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mercredi 14 juillet 2021

Cette fois sera la bonne

Les trois sorties précédentes précédents sur  mon  lac de St-Etienne Cantalès m'avaient laissé rentrer au port les cales vides hormis un gardon, la fierté écornée et la peau rougie. "S'il n'en reste aucun, ce sera moi" (1) est ma devise : et me revoilou déjà, les cannes en tous genres sous le bras et les hameçons rayant le parquet, ou, plus exactement, le ponton.


Un bijou, je vous dis

Il y a peu j'avais craqué pour un super moulinet que j'avais malencontreusement associé à une canne devenue sa limite principale, trop longue et encombrante démontée. Je m'étais offert ce moulinet américain tout de noir et d'or, du type "rêve de petit thon méditerranéen", étanche, dont je n'avais nul besoin au regard de mes capacités physiques actuelles comme de la salinité du lac. Mais bon, c'est comme un bijou, et plus encore avec sa tresse bleu-roi. Et ça ne répond pas à un besoin logique et vital, un bijou, non ? 


Donc, dans un souci d'ajustement sans fin, achetons en plus une canne kivabien au plan de son transport, sans s'éloigner d'objectifs halieutiques ambitieux et mesurés en même temps. Ce sera chez Décathlon, car il y a les cannes Ilicium dont on dit du bien, au moins chez Décath. Je longe le rayon, sans voir d'Ilicium, et vais m'enquérir chez la personne momentanément préposée aux appâts, car je suis du genre à ne pas voir un nez au milieu d'une figure. « Des quoi ? » qu'y m'dit ... Je répète. « On fait pas ça » répond-il avec le ton péremptoire teinté de fatigue de l'épicier à qui on demande des boulons de huit ou de la peinture à carreaux. "Mais c'est TA canne-phare, crétin, TA pub, TON gagne-pain, enfoiré !"  le remercié-je d'un grand sourire masquant civilement ma pensée. Il y a bien sûr des vendeurs très compétents chez Décathlon, en plus d'un SAV royal. Mais pas tout le temps.

Comme j'ai la carte bleue qui frétille dans ma main, je prends une autre canne, d'une puissance de 15 à 60 grammes, 2.40 m en brins égaux qui dit assurer jusqu'à 40 livres, d'action fast à semi-parabolique semble t'il. Oui, c'est devenu compliqué, une canne à pêche.

J'en profite aussi, tant qu'on y est, pour prendre un pack canne-moulinet prêt à pêcher pour 26 euros, canne de merdre de 1.80 m - et non trois comme je l'avais malu (2) - avec un minuscule moulinet de taille 1000 de la même matière, qui restera au bateau sans souci : pas de transport, et pas de crainte de vol, et ça marchera. Mission exclusive : pêcher les vifs dans 2, 4 ou 10 mètres d'eau et être prête à entrer en action en une minute. Quatre pauvres gardons lors de sa dernière venue en ont fait les frais. Et une pince à poisson de marque Rapala, qui m'aiderait à sortir de l'onde les silures, même gros commac, sans saloper l'épuisette, et peut-être plus facilement. Et quelques broutilles aussi, hameçons, flotteurs. Et les vertiaux (3), pour lesquels j'étais venu. 


C'est inévitable, et vous le savez tous. Après une série de bredouilles, vient LE jour . Et c'est aujourd'hui, je le sens. La gueule et la couleur du lac, déjà, l'odeur de l'eau et du soleil ensuite, tout me le crie. Ma stratégie est simple mais lumineuse. Je pêcherai l'anse de Rénac, pour son calme relatif un dimanche de beau temps. Car ailleurs les boats des skieurs, des monstres de plus de 6 mètres parfois, sont capables de couler un pauvre 4.80 m ou d'expédier le capitaine à l'eau rien qu'avec les vagues qu'ils (dé)génèrent sans pitié. Les silures, ou les brochets, ou les sandres ont ainsi une raison de plus de venir casse-croûter ici au calme, non ?

Enfin en place … Je pose virtuellement sur ma tête la casquette de seul maître à bord après personne d'autre. Dans un souci d'efficacité remarquable, j'arme illico la canne à quat'sous d'asticots motivés, et je lance. La surveiller en préparant les autres cannes, qui sont cinq, me permettra la pleine efficience du gars qui a tout son temps. Le coin de mon œil reste résolument au repos, même en amorçant un chouïa (1). Mes cannes sont bientôt prêtes ... Je vais voir mon seau vivier qui trempe à bâbord, où il reste un beau gardon, vivant mais peu dynamique, survivant des quatre, et de huit ou neuf paragraphes.

Pas moyen de prendre un seul gardon alors qu'ils abondent dans ce lac. Ils sont simplement ailleurs ou font la gueule à cause de la canne Apascher . Au bout d'une heure de soleil abrupt, je m'éloigne avec MON unique gardon, mes vertiaux (3), mes leurres. Car il est l'heure.

Je vais enchaîner trois dérives aussi lentes que possible, partant de trois points différents, freiné par une ancre flottante. Glander aussi, c'est très technique ... Concentré sur une seule canne, la toute neuve armée de mon moulinet tout beau, j'aide mon gardon à nager à un ou deux mètres du fond avec un montage « fireball ». Quand le vent me rapproche du bord, j'ajoute une ligne avec deux vers en « drop shot » et je gagne ainsi ma première perchette, qui jouera remplaçante pour l'instant. Du gardon. A un moment, je me suis laissé volontairement dériver vers 25 mètres de fond à la recherche d'échos sur le sondeur, en zone fondus de sports nautiques. D'ailleurs deux boats au loin arrivent, et je remonte mes lignes pour m'escamper. Et l'ancre flottante. Putainggg, le bout est coincée par l'échelle de bain. Mortecouille ! Mais j'ai bien le temps ...En dix-huit tournemains environ, je parviens à la libérer ... Et je me fais secouer grave par l'un des rafiots qui a réussi à se libérer de son poursuivant volant sur l'eau, et revient sur lui pour le noyer, me semble-t-il . Chaque fois, je me dis qu'on ne m'y reprendra pas. Mais je ne vais pas non plus acheter un chalutier, je pêche à la ligne, moi, Monsieur.


Le soir oui, mais pas le grand soir


L'heure avance, mais les poissons n'ont pas de montre. Ca va venir. Un peu de dérive encore dans 2 – 4 m d'eau, entre les bouées, avec cette fois la perchette fougueuse qui a quitté le banc des remplaçants. Et un peu de drop-ver et leurre souple ; et une seconde perchette succombe à un lombric. Je pars m'ancrer dans 6-7 mètres de fond vers 19:30. Une zone souvent riche en échos de sondeur sur un chenal peu marqué menant à la plage. C'est ici que ça va se passer, me dis-je tout en bronzant avec le soleil qui s'abaisse, et en terminant ma bouteille d'eau. Une ligne à vif avec la dernière perchette, une tirette lourde au ver, une dandine légère avec deux vers. Je poursuis encore quelques lancers de leurre sans résultat. J'installe la ligne au fire-ball suspendue à un mètre du fond. Attendre et espérer. Je suis bien, tranquille et attentif, prêt pour la bagarre et bercé par des ondulations douces envoyées de temps à autre par les sportsmen qui rentrent, à quelques 300 mètres de moi.

Et alors ... le soleil bascule derrière la ligne d'arbres ... Il est temps de plier. Demain, sardines.


Si residuum fuerit, me erit qu'on disait dans le temps

2 du verbe mallire.

3 vers de terre en patois bressan.



vendredi 11 juin 2021

Les Bonnie & Clyde du lac

Le mauvais coup était prémédité, et Clyde  avait, avec un complice, peut-être Buck, peut-être Henry, amené le bateau sur le lac sans se faire repérer, le dimanche matin, quand tous les honnêtes  gens sont au temple …




L'attaque a eu lieu en plein après-midi  Après un tour infructueux de l'anse de Rénac au gros leurre "salmo", au petit leurre vibrant à perche de 2 pouces, à la tirette au ver... Très très peu de mouvement repéré au sondeur. Mais Oukisson ? comme on dit dans l'Oklaoma et le Texas …

Le bruit du moteur au ralenti incommode Bonnie quand ce n'est pas pour un butin immédiat, aussi finit on par se mettre à une bouée par 4,50 mètres de fond, loin des abysses et en bordure du champ de bouées vacantes, et près de la plage. Silence et repos. Un poil de mouvement au sondeur au départ, certes, mais vraiment plus rien sur l'écran, ou si peu que la bredouille paraît aussi inéluctable que la chute de l'empire romain.

Ma douce Bonnie drop-shote (dandine) avec deux vers, je lance, ramène et anime avec et une monture de 3 g équipée d'un gros ver canadien, et un alevin en plastoc en teaser. Bonnie enregistrera une petiote touche avec ferrage raté en deux heures. Rien pour moi, à part le gros ver canadien réduit en charpie, sans doute pendant que je cherchais le brochet  au lancer.

"Ouh làààà !!!" que dit soudain ma complice, sa canne pliée à nonante degrés. Le poisson monte doucement mais réussit à se réfugier dans la chaine de la bouée qui économisait nos ancres. Grâce ou malgré mes conseils avisés -ou pas- la situation se dénoue et son record se retrouve dans l'épuisette : une perche de 41 cm. Je suis encore plus heureux que si c'était moi l'auteur de la prise. Elle passe de 450 g à 1.2 kg d'un coup d'un seul.

Bonnie et son butin


Une petite heure après c'est à moi de ferrer une touche à la fois discrète et  franche et de faire chanter un peu le moulinet. 44 cm, 1.45 kg. Mon record aussi.

Clyde bien content


De grosses boules ou de gros traits orange viennent trainer sous le bateau sans se décider, selon mon sondeur. Je pense à des silures, mais je manque de vers pour leur faire une grosse bouchée, et pas de petite perche de 20 cm ou moins à offrir au bout d'un hameçon. Une autre fois …


L'heure du couvre-feu était passée de 18 minutes au retour, mais sans encombre. Et dans la bonne humeur. Le lendemain midi, filets de perche …





samedi 24 avril 2021

Ô mon lac

 

Le temps s'étire autant que les œufs durent, si vous voyez. A la fin de ma condamnation à quarante-cinq jours sans appui sur ma jambe rafistolée -ou presque- je m'voyais déjà gambadant par les chemins zé les monts dès le quarante-sixième. Ou le quarante-dixième, au pire !

Ben non ! Ce n'était que pour sauter du fauteuil roulant au déambulateur glissant, ou aux béquilles sautillantes, tout en continuant à être criblé d'aiguilles. A J + 55 jours et autant de trous dans le bide, j'atteignais à peine, et à béquilles, les 250 mètres en terrain plat sans obstacle.

Mais là, à J + 2 mois pile, le jour d'ouverture de la pêche au brochet, je prends pour la première fois la route avec mon indomptable destrier et mon adorable épouse, ou inversement, jeter un coup d'œil à mon lac préféré. Ca alimenterait juste la machine à rêver, parce que pour pêcher au lancer avec deux cannes anglaises, il faudrait quatre mains ... Pas de pédale d'embrayage, donc je conduis sans difficultés. J'avais pris une canne à pêche, et une carte de pêche, pour le cas d'un contrôle policier inopiné. C'est à quarante bornes.

Un détournement du chat de Geluck



J'imaginais plein de bateaux au ponton, hélas sans le mien, et les remorques à bateaux des taquineux du brochet à foison sur le parking. Que dalle … Alors que je n'ai vu aucune info dans le Courrier International que je lis assidûment ni dans la presse locale que je n'ouvre jamais, je m'aperçois qu'on a presque vidé MON lac !!! Pour faire de la p...n d'électricité ? Juste pour m'emmerder ? Un complot ? J'en étais sûr … Si cet état date de deux mois, c'est un sale coup pour les brochets dont le frai s'est peut-être déroulé sans végétation pour y déposer leurs  œufs. Et pour les sandres ? Peut-être pas tout à fait aussi embêtant, je crois qu'ils fraient sur les fonds sableux … Cependant les hauts fonds habituellement choisis sont à sec.




Je n'ai vu que deux pêcheurs sur le lac, les nomades ayant probablement choisi des lacs avec le « bon » niveau, ou ont renoncé.


Bon côté des choses, la plage est immense. Et cette première sortie m'a fait un bien fou.


vendredi 9 avril 2021

Lève-toi et marche (doucement)

C'est en substance la parole de mon chirurgien, à J + 42 et 22 heures. Même s'il n'a pas paraphrasé le célèbre faiseur de miracles, il annonçait la bonne nouvelle.


Il donne dans des mots plus techniques, mon chirurgien, mais accessibles. En gros tout est bien à sa place du genou au bassin, c'est solide autant que ça peut l'être, et je peux m'appuyer sans restriction sur le membre rafistolé. Il a ajouté que ca n'irait pas tout tout seul quand même, et m'a quitté en me souhaitant bon courage pour la suite …Et rendez-vous dans deux mois.

Conjuguer sans faute une vingtaine de vis, plaques, tiges, liens, allo greffons avec des os en piteux état parmi des muscles étiques tient du réel miracle et de la bête charpente à la fois. On ne choisit pas le bois, c'est tout … Je redoutais tellement ce moment que j'aurais pu m'envoler de joie. Je me suis contenté de sourire largement, faut rester sérieux. Et vu la hauteur de plafond, un looping était de toute façon impossible.

Patient, on suppute, on redoute, on croit, on s'angoisse ou on s'enthousiasme vite, on dentdescie énormément. Cette fois, j'y suis, je vais pouvoir rêver pêche, et même chasse d'été en attendant de concrétiser dans les meilleurs délais. 

Après la presque-vie, la re-vie est là. Alléluia !


mercredi 24 mars 2021

La visite

Bulletin de santé numéro tant. J +  28, mais J plus un mois aussi par le miracle de février.  J'avais pensé à "la Visitation" pour le titre, pour le côté sacré et dans un délire de licence poétique, mais l'évocation de la vie mondaine de Marie ne sied guère à mon état de convalescent fragile.


Vous allez rire. Ou pas. Cela faisait hier exactement un mois que je n'avais vu personne d'autre que des soignants généralement masqués et parfois gantés, probablement pour ne pas être confondus  un jour par leurs empreintes ou par une caméra de surveillance.


Auxquels il faut quand même rajouter ma douce - qui me soigne, on n'en sort pas - et mon fils et son épouse.


C'était un peu comme ça. Un peu, hein !


Mais hier était un grand jour, je recevais des amis. J'avais astiqué le fauteuil roulant et bichonné les chromes du déambulateur pour accueillir mes visiteurs dans le plus grand apparat. J'étais en tenue civile, un peu dégradée certes par un jogging et un sweet shirt. Le grand banquet s'était mué en simple tarte aux pommes. Ah !  Ca fait du bien. Pas la tarte aux pommes, la visite ! Suivez, bordel ! Enfin si, la tarte aux pommes était délicieuse aussi. Brèfle *, un petit goût de revie** avec le soleil éclatant derrière la vitre et des amis près de moi.

"La visite" c'est ça aussi qui m'inspira le titre, mais moi,  je la voulais vraiment cette visite !  musique  

* Bérurier.

** mot nouveau.






dimanche 21 mars 2021

Retiens la nuit

 

J + 26


Ah, enfin une nuit presque correcte. Un anti douleur léger, un somnifère léger, et une jolie goutte d'une huile essentielle de Jenesékoi, ce merveilleux arbuste poussant je ne sais où, versée par ma douce sur un mouchoir. Hasard peut-être, mais j'ai enfin dormé par longues bribes d'une, deux ou peut-être même trois heures. Je ne souviens pas de la conjugaison exacte du verbe concernant la dormition et ces choses-là, tant j'avais perdu l'habitude … 

Je voulais même créer un groupe de pression et lancer une pétition pour rendre la nuit facultative. Si jamais quelqu'un chante " Retiens la nuit ", alors je jette mes aides auditives aux chiottes, je le poursuis en déambulateur, je l'étripe avec une vieille canne anglaise rouillée.



Ainsi va la presque vie, avec ses minuscules progrès et mes gros soupirs. Mais les prévisions sont bonnes avec un kiné miraculeusement annoncé, et une météo qui autorisera de petites sorties sur la terrasse. Ca va être dingue, carrément fou. 

Bises !

mercredi 17 mars 2021

Gigolo

 Bulletin de santé numéro tant.
J + 21.  Je teste l'état de gigolo depuis cinq jours. Un taf nouveau que j'explore. Je suis à l'essai, en fait ...


Jamais je n'ai souhaité m'abaisser à ce point, mais si on veut continuer à vivre il faut parfois payer de sa personne.

Attention je suis un gigolo d'un genre nouveau. Pas un beau gosse aussi bien fait de sa personne que fainéant. Oui, je sais, je suis fainéant aussi, mais là n'est pas la question.

Je me fais entretenir par une femme, donc. C'est l'essence du métier de gigolo. Mais pas de belles sapes pour moi, pas de Weston, pas de champagne, pas de palaces ni de voyages. Pas de havanes non plus, juste une cigarette électronique. Je reste donc bien au-dessus des apparences et bien en-dessous des apparats. 

Non, si je parle d'être entretenu, c'est bêtement l'entretien courant … Pas de toilettes coûteuses, mais la toilette, pas de grands restos, mais des petits plats, et at home.




Fournir la contrepartie est certainement dans le contrat. Et c'est forcément de l'amour … Mais le seul amour que j'ai en stock actuellement est strictement platonique.

Ce contrat peut -il raisonnablement tenir ainsi ? Un frisson m'a parcouru l'échine hier soir, quand ma belle m'a servi des champignons.


Ils étaient bien comestibles. La presque vie continue ...