La Vallée sèche : Au milieu ne coule aucune rivière |
Malgré quelques soucis finissants de Maladie de Lyme et d'autres à leur commencement, j'avais décidé de quand même profiter d'une proposition de chasse au brocard au sein d'un petit groupe de copains, en un endroit réputé pour sa population de chevreuils. Seul, je serais resté au frais à me plaindre de mes misères…Mais au frais. Deux heures de route nous amènent au bord du Quercy blanc, sans doute nommé ainsi parce que chauffé à blanc. Je découvre que notre gîte est équipé d'une piscine. Après un réhydratant mitonné par Monsieur Heineken et servi par René, notre hôte, nous prenons une légère collation à base de crudités auvergnates, lesquelles comportent au minimum jambon cru, saucisse sèche, et fromages au lait cru. Et c'est parti pour la première chasse du soir.
Car c'est pour tirer un brocard au temps des amours que je suis venu. Quelques journées de plaisir cynégétique qui me permettront d'emporter de quoi mitonner quelques moments de plaisirs gastronomiques, si Diane le veut bien. La chasse d'approche - marche lente- , et d'affût -immobile au sol ou perché dans un arbre ou sur un mirador- est productive au lever du jour et le soir jusqu'à la nuit.
C'est une région calcaire d'aspect aride en été, aux rivières invisibles et à l'eau très rare en surface. Les murets de pierre sont innombrables, jusque dans les forêts nées du départ des hommes et de leurs bras. De nombreuses cazelles, ces cabanes de pierre, y existent encore, parfois en bel état. De 1870 à 1945, la population du Lot avait fondu, une émigration vers l'Amérique du sud avait aussi existé avant la grande guerre. Moutons et céréales devaient se partager ces terres autrefois. Il reste peu d'agriculteurs.
Une jolie cazelle rattrapée par la forêt |
Aujourd'hui, la déprise agricole y fait rage, au grand dam des espèces sauvages, j'imagine, car à cette saison on les trouve dans les parcelles exploitées : les chaumes sont visités par sangliers, chevreuils et palombes, la luzerne attire les chevreuils. Les prairies qui n'ont pas vu de faucheuse depuis quelques années semblent désertées à cette période.
Ce premier soir, nous prenons un chemin quelque part, à moins d'un kilomètre du gîte. Plus de trente degrés encore. Je renonce aux gants, pas à la cagoule. L'équipement « résille » de Gilles est affriolant pour la biche et le sanglier, paraît-il. Le brocard avec lequel rendez-vous avait été fixé par mon guide me pose un lapin qui lui-même me fait faux-bond, pour dire à quel point il n'est pas là … Seule son amoureuse, accompagnée du produit d'une liaison passée me tient gentiment compagnie toute la fin de soirée. Si Monsieur n'est pas du soir, du matin il sera, me dis-je. A demain donc ! Gilles observe de son côté chevrette, (trop) petit brocard , biche et son faon, sanglier et glière. Ça fait beaucoup pour un seul homme, même si sanglier n'est pas cent gliers.
Je dors du sommeil du juste-qui-a-trop-chaud jusqu'à cinq heures et quelques minutes. Et retour au même endroit, avec la même observation … sauf le chevrillard qui fait la grasse-matinée, le veinard. Je suis logé sur une chaise d'affût à laquelle ne manque qu'un compartiment réfrigérateur et une climatisation. Et un monte-échelle Astana, tant qu'on y est.
Toujours autant d'affluence autour de Gilles qui veut un renard ou un beau brocard … et voit tout le reste. Comme il ne fait que vingt-X degrés - il faut un X majuscule- nous visitons après la chasse ce vaste monde désert, pour des repérages encore possibles à cette heure. Il est environ 9 heures.
Nous nous arrêtons près d'une combe fraîche d'apparence, semée de luzerne, pour y jeter un œil. Un brocard y fait sa cour et la belle lui cède sans barguigner en présence de deux magnifiques chevrillards qui jouent gaiement. Je ne pense même pas à faire de photo, tant la scène est superbe. Gilles installe pour moi la chaise d'affût en fin de matinée. Nicole et Marc nous rejoignent, et l'équipe est au complet.
Vingt heures et un brin, je suis sur la chaise ; il fait chaud, chaque souffle est une bénédiction. Un piaf de marque indéterminée vient partager mon arbre ; camouflé comme je suis il sera un temps sans me voir. Vingt et une heures, rien … Il faut peut-être que je bouge, aller voir la parcelle d'à côté ? Que non, un chevrillard apparaît dans mon champ de vision - qui est de luzerne aussi - puis sa maman, puis le joli garçon. Photo-je ? J'ai peur de perdre cette occasion et ma carabine me tend la crosse... Un peu plus de cent mètres, de profil, je repère sa position au mieux, je vise la base du cou.
Sur la chaise d'affût |
Je ne vois que du jaune orangé au tir, pas d'animal tombant ou fuyant. Madame, après avoir sans doute pesté contre le tonnerre ou les feux d'artifice, continue à manger à vingt mètres de l'emplacement de son prétendant, et le chevrillard à mener sa vie. Le mâle doit être tombé, car sa fuite aurait alerté sa belle. J'attends dix minutes, la chevrette est enfin au bord du champ, je descends l'échelle et je vais à la recherche de mon animal. Je me dis que j'aurais dû tirer au thorax car… je l'ai raté ou quoi ? Ouf, il est là, tombé dans ses pas. Je me reconnecte avec le plaisir de la belle prise et du tir parfait.
Pendant ce temps, à un kilomètre de là, la chose se passe moins bien pour Nicole. Le chevreuil titube … et s'enfuit. Morosité. Le lendemain matin, je dépose Gilles à la recherche d'un renard ou d'un beau brocard, puis je file vers ma nouvelle adresse, espérant observer plein d'animaux, et tirer éventuellement un renard. Rien sur le chaume, je descends de la chaise et je pirsche tranquillement, quand je suis averti par Gilles qu'il a tué un brocard. Congratulations. Nous revenons au gîte juste pour voir le départ de Nicole et Marc vers leur recherche au sang. Les Lotois sont magnifiquement organisés pour ne perdre aucun gibier.
Le chevreuil sera mis sur pied en une heure et pris par le chien de sang (Rouge de Bavière, ou Blanc d'Alsace, je ne me souviens guère). Balle de sternum en séton. L'objectif des trois chevreuils est atteint, Nicole fête son premier brocard à l'approche et nous quitte ensuite, avec Marc. Pour Gilles et moi, un peu de visite du territoire, et retour dans mon arbre en soirée.
Gilles m'a initié le jour-même à la chasse du renard aux appâts, traînant la peau du brocard et dispersant quelques entrailles sur un chaume connu pour l'existence de terriers proches … Un renardeau ne manque pas de venir, et je ne le manque pas non plus. Le lièvre abonde dans cette zone et les responsables de la chasse nous demandent de tirer les renards autant que possible.
Images du Quercy |
Et puis c'est le dernier matin de chasse, après une nuit très chaude. Au sens premier du terme, évidemment. J'arrive presque au pied de l'échelle, quand une forme noire apparaît : un sanglier. C'est merveilleux, je l'observe à loisir en train de glaner, je le photographie comme je peux, sans lumière. Une forme noire traverse l'objectif. Marcassin ? Non renard. Il est très mobile et j'ai du mal à le tenir dans le réticule de la lunette, carabine sur le double bipied "4 stable stick". Grande flamme. Ni chute ni fuite observée … Sans doute mort ? Je ne le trouve pas. Donc manqué ? Je suis consterné, car je n'aime pas le doute qui suit un mauvais tir.
Je pars chercher Gilles pour démonter la chaise d'affût, et nous trouvons ensuite au grand jour sans problème les deux renards. C'est une femelle adulte, elle est tombée dans sa trace. Je marche de travers, mais je tire droit encore ...
Le tableau de chasse du groupe |
Félicitations trois balles trois pièces. Lyme ne t'as pas achevé!
RépondreSupprimerMerci ! Je pense que Lyme se conjugue au passé pour moi.
SupprimerBravo Régis ! Marche de travers, tire juste et écrit parfait. Le blog de WH : le meilleur complément alimentaire du petit-déjeuner dominical.
RépondreSupprimerMerci et je suis heureux de contribuer à ta satiété dominicale !
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